Georges-L. Godeau
Georges-Léon Godeau, que firmaba sus textos con el nombre de Georges L. Godeau, fue un poeta francés (1921-1999).
Sus textos, generalmente en prosa, son cuadros de la vida cotidiana, con una clara preferencia por la gente corriente de su región. Fue traducido a varios idiomas, incluyendo el japonés, ucranio, ruso y alemán, y recibió el premio Max-Pol-Fouchet . Publicó alrededor de veinte libros, entre los cuales
• .Votre vie m'intéresse, anthologie, Le Dé bleu 1985, reedición 2000.
• C'est comme ça, Le Dé bleu / Le Castor astral, 1988.
• Avec René Char, Le Dé bleu, 1989.
• Après tout, Le Dé bleu, 1991.
• La Vie est passée, Le Dé bleu, 2002
Georges-L. Godeau / Los golfillos /
Georges-L. Godeau
Los golfillos
Extractos de “Votre vie m'intéresse, Ed. Le dé bleu, 1985
Traducción de Marceau Vasseur et Miguel Ángel Real
Les petits voyous
Les petits voyous s'en vont à l'école. Ils ramassent des cailloux pointus pour rayer les voitures. Les plus belles, le plaisir est plus fort.
Les pardessus des petits voyous sont trop courts. La mère est manœuvre à l'usine. Elle taille dans les vieux effets, entre onze heures et minuit. La baraque est froide. Ses doigts sont gourds.
Les enfants sont couchés dans le même lit. Ils ont des yeux pour voir et des oreilles pour entendre la misère.
A force, la misère, elle met des pierres dans les mains.
Los golfillos
Los golfillos van a la escuela. Recogen piedras puntiagudas para rayar los coches. Los más hermosos: el placer es mayor.
Los gabanes de los golfillos son demasiado cortos. La madre es peón en la fábrica. Corta telas viejas entre las once y medianoche. Hace frío en la casucha. Sus dedos están entumecidos.
Los chicos están acostados en la misma cama. Tienen ojos para ver y orejas para oír la miseria.
De tanto insistir, la miseria pone piedras en las manos.
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Rue Bastard
Une rue courte, entre l'usine à gaz et le stock à charbon.
La peau des murs est noire comme celle du gardien du magasin. Un homme qui boit et parle seul, à sa fenêtre.
Parfois, au printemps, deux jeunes s'isolent dans une encoignure.
Ils n'y reviennent pas à cause des rats qui voyagent d'un égout à l'autre.
Rue Bastard
Una calle corta, entre la fábrica de gas y el almacén de carbón.
La piel de los muros es negra como la del vigilante de la tienda. Un hombre que bebe y habla solo asomado a la ventana.
A veces, en primavera, dos jóvenes se aíslan en un rincón.
No vuelven a causa de las ratas que viajan de una alcantarilla a otra.
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Le chaudronnier
Ma mère est morte, ma femme est folle et je n'ai pas d'enfant. Alors je bois du vin rouge et je gueule.
Dans le quartier, les gens ferment les portes à mon approche. Ils ont tort. Je suis un brave homme.
Parfois, dans les jours sombres, je travaille. L'antiquaire me confie des cuivres à refaire. Il dit que je suis le meilleur chaudronnier.
Au bistrot, ça me pose.
El calderero
Mi madre ha muerto, mi mujer está loca y no tengo hijos. Así que bebo vino tinto y grito.
En el barrio, la gente cierra las puertas cuando me acerco. Se equivocan. Soy un buen tipo.
A veces, en los días oscuros, trabajo. El anticuario me confía algunas piezas de cobre que arreglar. Dice que soy el mejor calderero.
En el bar, eso me da empaque.
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Turbulences
L'avion est gros et sale. Mais les frigos sont pleins de Ricard, de Bordeaux et de steak, et Paris est au bout. Là-haut, dans le soleil, sur les œufs à la neige,tout serait parfait si la coque soudain n'allait d'un côté et les ailes de l'autre. Parfois, un bruit de fer. Le silence gagne les rangs, les visages blêmissent, chacun pense aux siens, à ce beau voyage qui va s'arrêter là. Personne en saura jamais pourquoi, un peu plus loin, il a changé d'avis.
Turbulencias
El avión es grande y sucio. Pero los frigoríficos están llenos de Ricard, de Burdeos y de filetes, y París está al final. Allí arriba, en el sol, sobre los huevos a punto de nieve, todo sería perfecto si de repente el fuselaje no fuera hacia un lado y las alas hacia el otro. A veces, un ruido de hierro. El silencio recorre los asientos, los rostros palidecen, cada uno piensa en los suyos, en este hermoso viaje que va a detenerse aquí. Nadie sabrá nunca por qué, un poco más lejos, ha cambiado de opinión.
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Quand les jours
Quand les jours ne se lèvent pas, que, le menton dans la main, ils s'appuient sur les créneaux du donjon pour réfléchir, comme s'ils préparaient un grand coup, par exemple de s'en aller définitivement,
quand le hasard veut que l'on ait à cet instant tout le monde contre soi, le patron, la femme de ménage, le journal, le marchand de poisson,
il arrive qu'au bout d'un crayon mal taillé jaillissent des choses étonnamment belles capables de réjouir le dernier ami qui vous reste.
Il est prudent de garder dans son gilet cette petite lumière qui vous aidera à passer les ombres, le temps que les jours changent d'avis, ce qu'ils n'ont jamais cessé de faire jusqu'à maintenant.
Cuando los días
Cuando los días no se levantan y, con la barbilla en la mano, se apoyan sobre las almenas del torreón para pensar, como si preparasen algo grande, por ejemplo irse definitivamente,
cuando el azar hace que uno tenga en ese instante a todo el mundo en su contra, el jefe, la mujer de la limpieza, el periódico, el pescadero,
sucede que de la punta de un lápiz mal afilado surgen cosas extrañamente hermosas capaces de alegrar al último amigo que te queda.
Es prudente guardar en su chaleco esa lucecita que te ayudará a atravesar las sombras, hasta que los días cambien de opinión, algo que no han dejado de hacer hasta ahora.
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A la porte des églises
Les paysans qui présentent leurs condoléances entre les dents ont des souliers de plomb, la tête nue et parfois dans l’œil une petite lumière spéciale pour vous, parce qu'ils vous ont connu petit, ou qu'ils étaient voisins de votre père, qu'ils fauchaient avec lui, ou avec ses outils. Ils confirment ce lien particulier en serrant votre main une seconde de plus à la broyer. Quand on peut, il faut durcir la sienne et tenir comme un fer. Il en sort un nouveau contrat et de leurs poils une larme qui cherche son chemin et tombe plus loin dans l'herbe quand ils recalent leur casquette.
En la puerta de las iglesias
Los campesinos que dan el pésame mascullando tienen zapatos de plomo, la cabeza descubierta y a veces en la mirada una lucecita especial para uno, porque te han conocido de pequeño, o eran vecinos de tu padre, o segaban con él, o con sus herramientas. Confirman ese lazo particular apretándote la mano hasta casi molerla. Cuando se puede, uno tiene que retesar la suya y aguantar como un hierro. De ahí surge un nuevo contrato y de sus pelos una lágrima que busca su camino y cae más lejos sobre la hierba cuando vuelven a calzarse la gorra.
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Champ magnétique
René Char m'a offert une canne en buis. Je l'ai clouée chez moi en face de mon bureau. Plus je la contemple, moins je ne puis écrire.
Hier, je l'ai mise sur l'armoire. L'araignée l'a parcourue en zigzag puis a tissé quatre épaisseurs de toile comme pour arrêter quelque chose. Assise maintenant au fond, elle m'observe de son œil noir.
Pardi !
Campo magnético
René Char me ha regalado un bastón de boj. Lo he colgado en mi casa frente a mi escritorio. Cuanto más lo contemplo, menos puedo escribir.
Ayer lo puse sobre el armario. La araña lo ha recorrido en zigzag y después ha tejido cuatro capas de tela como para detener algo. Ahora, sentada al fondo, me observa con su ojo negro. ¡Diantre!